[ALTER-] Prospective

Les Rockefeller verts de colère contre Exxon

Libé

mercredi 28 mai 2008 par Ronan , Libé

Energie. La famille du fondateur de la major pétrolière veut forcer son président à investir dans les renouvelables.

PHILIPPE GRANGEREAU

QUOTIDIEN : mercredi 28 mai 2008

La famille Rockefeller, actionnaire historique de l’américain Exxon Mobil, s’est liguée contre le PDG de la multinationale, Rex Tillerson. Elle l’accuse de suivre une stratégie à court terme en refusant une diversification dans les énergies renouvelables, alors que le groupe - fortement bénéficiaire - pourrait se le permettre. L’an dernier, le titan du pétrole et du gaz naturel a dégagé un profit de 40 milliards de dollars (25 milliards d’euros, soit le PIB de la Slovénie). Quinze des descendants de John Rockefeller, fondateur (en 1870) de Standard Oil, devenu Exxon Mobil, vont tenter de convaincre les autres actionnaires de les suivre lors du Conseil d’administration de la compagnie, aujourd’hui à Dallas.

Ils n’ont collectivement que 1,72 % du capital d’Exxon. La révolte est conduite par Neva Goodwin Rockefeller, une économiste de 63 ans qui roule en voiture hybride. Soutenue par le dernier petit-fils de Rockefeller, David (93 ans), elle est suivie par 19 investisseurs institutionnels, parmi lesquels le fonds de retraite de la ville de New York, qui déplore la « culture de méfiance » d’Exxon Mobil, et son « indifférence à l’égard de tous les sujets d’importance et de long terme ». « L’appât du gain, l’arrogance et une stratégie à courte vue d’Exxon Mobil mettent en danger la réputation de l’entreprise, la santé de l’homme et de la planète, et nos bénéfices », écrivait samedi dans le Houston Chronicle Jane Owen, l’une des descendantes d’un autre père fondateur d’Exxon, Robert Blaffer. Tous ces actionnaires exigent « des mesures concrètes pour résoudre les problèmes liés au changement climatique ».

Indigeste. Persuadés que le PDG n’est pas enclin à les satisfaire, ils vont présenter une motion privant Rex Tillerson de ses fonctions de président, lui laissant le titre de directeur général. L’an dernier, une résolution similaire avait emporté 40 % des suffrages des actionnaires. Cette année, le clan Rockefeller veut faire soumettre au vote un agenda « vert » plus indigeste pour les ploutocrates de la maison mère, très en cheville avec l’administration Bush. Il est question de normes de réduction des émissions de gaz à effet de serre des raffineries, d’un programme astreignant de recherche sur les renouvelables, et de la constitution d’un groupe d’étude sur les effets du réchauffement sur les économies pauvres du monde…

« Exxon appartient à ses propriétaires » : tel est le slogan des rebelles Rockefeller. Certains militent dans des associations écologiques, à commencer par Goodwin, directrice adjointe de l’Institut de l’environnement et du développement global (GDEI). Leurs arguments (et leurs motivations) sont autant financiers que moraux. Si Exxon Mobil rate le coche des renouvelables, craignent-ils, les bénéfices de l’entreprise en pâtiront. Mais le cours des actions d’Exxon Mobil a plus que doublé en quatre ans, et au regard de la rentabilité du groupe, il sera difficile à cette alliance minoritaire de richissimes francs-tireurs d’imposer son point de vue, estime le Wall Street Journal. A l’inverse d’autres multinationales, telle Royal Dutch Shell qui est devenue le quatrième fournisseur mondial d’énergie solaire, Exxon reste sur une voie étroite. Se limitant à des investissements négligeables dans les batteries électriques pour véhicules hybrides. « Nous sommes une compagnie pétrolière et pétrochimique », réitérait récemment Rex Tillerson, le PDG d’Exxon, qui estime que le pétrole et le gaz naturel vont demeurer l’énergie primordiale. Il se refuse à investir dans les énergies alternatives « simplement parce que c’est politiquement correct ».

Lobbies. Des convictions qu’Exxon a mises en pratique en finançant des groupes de pression pseudo-scientifiques qui ont maintes fois offert leurs analyses biaisées aux membres du Congrès américain. Dans un rapport, l’Union des scientifiques a accusé Exxon Mobil d’avoir dépensé 16 milliards de dollars (10 milliards d’euros) entre 1998 et 2006 pour financer 43 de ces lobbies niant le réchauffement. Ce n’est que l’an dernier qu’Exxon Mobil, via son responsable des relations publiques, Kenneth Cohen, a reconnu l’existence d’un « risque sérieux » de changement du climat planétaire.

http://www.liberation.fr/actualite/economie_terre/328520.FR.php


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